Le projet de la crèche rue du Guignier est assez représentatif des difficultés actuelles de la construction à Paris. Le terrain est au cœur d`un quartier hétéroclite, mêlant petits et grands bâtiments anciens avec de faux bâtiments de faubourgs médiocres des années 1980 et 1990. La parcelle n`offre sur la rue qu`une petite façade, elle s`enfonce en profondeur dans l`îlot ; elle est orientée au nord et sans recul face à un haut bâtiment de logement. Enfin le terrain est en forte pente.

La ville a décidé d`utiliser ce terrain impossible pour y construire une crèche. On pourrait y implanter une crèche de 30 berceaux sans trop de difficultés, elle décide donc d`y construire une crèche de 66 berceaux.

À force de vouloir exploiter le foncier, on arrive ainsi à Paris à une densité extrême. Une densité telle que toute respiration, tout vide ne peut être le résultat d`un choix architectural ou urbain mais d`une simple application règlementaire. Le projet se limite au possible : au mieux un possible « habillé », mais rien de ce qui fait la ville – la liberté, l`invention d`un lieu – rien de cela ne peut vraiment trouver place.

Dans ce contexte impossible, nous avons essayé de faire quand même un peu d`architecture : ouvrir la crèche un peu au sud, agrandir le jardin (pris sur la parcelle voisine) en le prolongeant dans notre terrain.

Nous avons souhaité également faire du projet un bâtiment public (c`est à dire, en somme, à la fois singulier et complice). C`est pour cette raison que nous avons choisi de construire le projet en bois, mais de le peindre dans un bleu profond, abstrait : une couleur adaptée à la longue façade nord (si nous avions su qu`il n`y avait rien à perdre, nous l`aurions peint en noir)

Après coup : la façade nord est assez belle, la proue sur la petite rue du Guignier n`est pas si heureuse, trop contrainte et complexe pour son échelle.